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Inspi 13/04/2018 - 8h32 par Andreas Verner

La cacophonie silencieuse de la forêt 

C’est maintenant une connaissance de notoriété quasiment publique : les arbres communiquent. Ce phénomène est dû au travail formidable de Peter Wohlleben et son succès mondial de “La vie secrète des arbres” en 2017. Cependant les mécanismes de recherche sont souvent ignorés. Pourtant la plupart des questions posées sont encore ouvertes, nous n’en sommes qu’au balbutiement de la compréhension de la complexité de nos systèmes forestiers.

Le cas d’école de l’Acacia

C’est grâce à cet arbre commun de la savane africaine que la possibilité d’une communication entre les végétaux était envisageable. Des chercheurs Sud-Africains ont constaté dans les années 80, que lorsqu’un acacia était attaqué par un koudou (une espèce d’antilope) il commençait automatiquement à augmenter la saturation en tanin de ses feuilles afin de les rendre impropres à la consommation. Mais cela ne s'arrête pas là, dans le même temps, il a été mis en évidence que l’arbre sécrète un certain type de “phéromones” qui, lorsqu’elles se déposent sur les feuilles d’un autre acacia, le prévient de la présence de prédateurs aux alentours. L’arbre qui a reçu l’information s’empresse alors lui aussi d’augmenter la concentration en tanin dans ses feuilles afin d'être préparé au préalable à l’arrivée de ces prédateurs.

Depuis, plusieurs mécanismes bien plus complexes ont été mis en évidence.

Après le Wifi et le Lifi, l’internet de la forêt

Quelques années plus tard, Peter Wohlleben a lui de son côté mis en évidence la communication des arbres non pas par voie aérienne, mais par voie terrestre.

Il a tout d’abord montré que par les réseaux racinaires dans des situations de proximité forte entre les arbres, ils peuvent se communiquer des informations sous forme de cocktails chimiques et même d’impulsions électriques faibles. A vitesse modeste certes, à peu près un centimètre par seconde, mais ce qui reste rapide quand on considère l'activité d’un arbre. Le problème étant que même si les systèmes racinaires peuvent atteindre des tailles impressionnantes, la plupart restent modestes. Ce n’est pas le cas des réseaux de champignons, qui existent en symbiose avec les arbres et qui eux, peuvent couvrir plusieurs kilomètres carrés du sous-sol de la forêt. Pour avoir l’autorisation d’utiliser ce réseau haut débit, les arbres donnent également des nutriments aux champignons qui se mêlent aux racines, un peu à la façon d’un péage d’autoroute. Voilà comment les arbres peuvent communiquer d’un bout à l’autre de la forêt sans se soucier du vent et autres systèmes imprédictibles. 

Bientôt la parole ?

Certaines études récentes tendraient même vers l’idée que les arbres et végétaux peuvent communiquer “par voie orale” par une série de craquements d’écorces ou de racines, qui permettraient d’échanger des informations de façon aussi rapide que les humains. Bien sûr le temps de réaction une fois qu’ils ont l’information en branche est toujours le même, long. Cependant cette possibilité de communication rapide, auquelle s’ajoute les deux méthodes évoquées précédemment, participent à offrir aux végétaux un large panel de moyens de communication.

Peut-être un jour nous serons capables  de décrypter ces messages transmis par les végétaux afin de les comprendre. On pourrait même imaginer la possibilité d’une communication entre arbre et humain : une révolution pour les agriculteurs. Pouvoir expliquer à un arbre qu’il doit pousser dans une certaine zone seulement au risque de se faire couper les branches. La plante en question arrêterait de se faire mutiler inutilement et l’agriculteur arrêterait de perdre du temps à couper des branches qui envahissent le territoire d’autres cultures. Reste à savoir ce qu’il se dit, dans cette cacophonie silencieuse.

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